Mon Espace Santé décollera-t-il mieux que le DMP ?

Depuis début février et tout au long du premier trimestre 2022, Mon Espace Santé (MES) est créé pour chaque Français. Les 65 millions d’assurés en sont avertis par un mail ou un courrier de l’Assurance maladie. Charge aux réfractaires de signifier leur opposition à cette ouverture dans les six semaines.

MES prend le relais du dossier médical partagé (DMP) qui n’a pas trouvé sa place, ni auprès des assurés, ni auprès des soignants et dont les créations ont cessé en juillet dernier.

Il contient d’entrée de jeu le contenu du DMP. Les antécédents, historique et informations personnels dans l’onglet « Profil médical » doivent être complétés par le patient lui-même. « Cela prend environ une à deux heures », note Dominique Pon, responsable ministériel au numérique en santé.

Mais nombre de patients auront sans doute besoin d’aide. Les responsables du numérique en santé tablent sur la solidarité de l’entourage voire le soutien des réseaux d’aidants et de bénévoles.

Différents documents peuvent également être archivés dans MES : mesures de constantes de santé, directives anticipées et personne de confiance, carnet de santé, carte Vitale, de mutuelle, de groupe sanguin…

Puis, il sera enrichi progressivement par les documents envoyés par voie électronique par les différents professionnels de santé : compte rendu d’hospitalisation, prescriptions, résultats d’examens complémentaires… ainsi que par Si-Dep et Vaccin Covid.

MES comporte également une messagerie sécurisée nationale de santé (MS-Santé) labellisée qui permet aux professionnels de santé de dialoguer entre eux et d’échanger avec les patients. Cette messagerie se déploie progressivement au fil de l’équipement des professionnels de santé en logiciels conformes et interopérables. « Actuellement, 60 % des médecins de ville sont équipés. Nous visons 80 % pour fin 2022 », précise Dominique Pon.

 

Un tournant pour la coordination interpro

Un volet médical de synthèse est rempli par le médecin traitant pour la coordination des soins.

Les notifications sont laissées au choix du patient. Les accès des différents professionnels de santé à ses données sont soumis à son consentement explicite, sauf pour le médecin traitant qui peut consulter l’ensemble du dossier. Un historique des consultations des données sera disponible. Un accès sous format « bris de glace » est prévu pour les services d’urgence en cas de nécessité.

« Le MES marque un tournant pour la coordination facilitée entre professionnels de santé et un gain de temps au bénéfice du patient », déclare Marguerite Cazeneuve, directrice déléguée de la Caisse nationale d’Assurance maladie (Cnam) qui ajoute : « Au-delà d’un accompagnement massif de la population pour la prise en main de MES, nous procurerons une aide technique aux professionnels de santé concernant le référencement des logiciels. Une incitation financière est également prévue pour les médecins pour commencer, puis pour les pharmaciens ». L’intégration du volet numérique est en discussion entre l’Assurance maladie et les syndicats de pharmaciens dans le cadre de la négociation de la nouvelle Convention. Le MES constitue un changement important dans l’exercice des professionnels de santé qui s’accentuera dès que tous les logiciels métiers des professionnels de santé de ville et des établissements hospitaliers seront interopérables. Tous les outils numériques doivent répondre à des normes opposables de sécurité et d’interopérabilité. « Dix-huit éditeurs de logiciels métier sont déjà en conformité et 85 sont en cours de référencement, indique Laure Létourneau, déléguée ministérielle au numérique en santé. Leur déploiement montera en puissance à partir de juin 2022. »

 

Des évolutions dans les prochains mois

Courant 2022, le MES s’enrichira d’un agenda de santé et d’un catalogue de services et applications. « Dans celui-ci devrait figurer à terme l’application Mon DP permettant au patient d’avoir accès à son dossier pharmaceutique (DP) et à des alertes et des outils autour de l’observance », dévoile Carine Wolf-Thal, présidente du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens.

Puis, l’envoi automatisé des données de santé dans le Dossier médical de MES est prévu d’ici fin 2023, tout comme la récupération des constantes de santé issues d’appareils connectés…

Le MES est accessible sur tous les écrans et une application mobile sera disponible au deuxième trimestre 2022.

« Mon Espace Santé est le résultat de trois ans de travail des pouvoirs publics. Après une phase pilote réussie dans trois départements depuis septembre 2021, il concrétise le virage numérique de l’accès aux données de santé », conclut Dominique Pon.