Économie de l’officine : 2023, une année noire ?
Les moyennes professionnelles du réseau d’experts comptables KPMG réalisées à partir des comptes annuels d’un échantillon de 802 officines ayant clos un exercice de 12 mois en cours de l’année 2022 vont laisser quelque part des regrets. L’année 2022 a représenté le plus haut de la marche depuis la reprise de la croissance en 2017 : +12,7% d’augmentation du chiffre d’affaires HT moyen, +15,8% d’évolution de la marge globale en valeur et un gain de 1 point en taux moyen de marge brute commerciale à 33,1%, soit le niveau le plus haut atteint grâce aux tests antigéniques et vaccins Covid (135 k€ de CA générés en moyenne par pharmacie et quasiment autant en marge, +1,6 point de hausse du taux de marge à TVA 2,1% et 0% à 31,6%, +19,4% d’augmentation de marge sur le remboursable).
Dans le même temps, les charges externes ont progressé de + 8,9 %, soit beaucoup moins vite que le CA et la marge, tandis que les frais de personnel, pourtant dopés par l’inflation sur les salaires et les embauches temporaires pour faire face aux nouvelles missions liées au COVID, ont augmenté de 11,5%. Mais, selon KPMG, ils n’ont pas impacté la rentabilité aussi fortement qu’on aurait pu l’imaginer. La performance commerciale et de gestion (PCG) qui est l’indicateur financier le plus pertinent de mesure de la rentabilité de l’officine a progressé l’an dernier de 21,2%.
Au vu des performances réalisées en 2022 qui se sont traduites par une consolidation des trésoreries (227,9 k€ en moyenne par pharmacie en 2022 contre 190,9 k€ en 2021) pour 95% des officines (seulement 5,24 % des pharmacies de l’échantillon étudié clôturent leurs comptes avec une trésorerie négative), Emmanuel Leroy, expert-comptable associé, leader national santé de KPMG, ne tient pas de discours alarmiste lorsqu’on présente « l’effet de ciseaux » entre les charges et la marge comme une épée de Damoclès au-dessus des officines. « La rentabilité en 2023 sera évidemment moins élevée mais, au vu des résultats du premier semestre 2023 que nous avons analysés, la PCG des officines sera suffisante pour permettre les remboursements d’emprunt et assurer la rémunération des titulaires, ces derniers risquent en fait de consommer leur énergie plus que leur trésorerie. » Selon lui, la situation restera préoccupante pour les 20% de pharmacies qui ont enregistré une évolution négative de leur PCG en 2022.
Vente libre : des marchés résilients en 2023
Face à l’accélération du développement des médicaments chers et au fort ralentissement des volumes délivrés en cumul fixe sur les cinq premiers mois de 2023 selon des données IQVIA Pharmastat, Emmanuel Leroy recommande aux titulaires, sur le marché de la vente libre (en recul de 0,2% en valeur et de 5,1% en unités), de répercuter avec discernement l’inflation de leurs prix d’achat labos, partiellement sur les produits de forte rotation, dits « sensibles » pour lesquels il faut travailler une image prix « attractive » et totalement sur les produits à moindre notoriété. Depuis le début de l’année, hormis la médication familiale, (+1,8% en CA, -2,6% en unités,), les autres marchés de la vente libre restent bien orientés tant en valeur qu’en volume (beauté & hygiène : +8,3% en CA, +1,9% en unités, nutrition : +6,3% en CA, +4,8% en unités, compléments alimentaires : +8,1% en CA, +8,5% en unités).