Guide pratique de la vaccination en pharmacie.

Découvrez comment aborder et promouvoir la vaccination au comptoir de manière efficace et pratique. De l'utilisation du carnet de santé comme point de départ à l'approche saisonnière, en passant par la discussion avec les patients réticents, explorez des stratégies pour favoriser la vaccination en officine.

Thomas Kassab, DU de pharmacie clinique, publié le 12 janvier 2024

Guide pratique de la vaccination en pharmacie.

Calendrier vaccinal et immunogénicité

La réaction immunitaire est la réponse du système immunitaire du corps à la présence d’un agent pathogène ou d’un antigène, comme c’est le cas avec un vaccin. Lorsqu’un individu est vacciné, son système immunitaire est exposé à une partie inoffensive de l’agent pathogène, telle que des protéines virales ou bactériennes, des morceaux de leur ADN ou de leur ARN (dans le cas des vaccins à ARNm), ou des antigènes purifiés. Cette exposition déclenche une réponse immunitaire qui comprend la production d’anticorps spécifiques et le développement de cellules immunitaires mémoire.

L’immunogénicité d’un vaccin mesure son efficacité à induire une réponse immunitaire. Certains vaccins sont très immunogènes et provoquent une réponse robuste et durable, tandis que d’autres peuvent nécessiter des rappels pour maintenir une immunité protectrice. Par exemple, le vaccin contre la rougeole est généralement très immunogène, et une dose unique confère une protection à long terme. En revanche, certains vaccins, comme celui contre la grippe, nécessitent des rappels annuels en raison de la variabilité des souches virales.

Le calendrier vaccinal est ainsi conçu pour maximiser la protection contre les maladies infectieuses en tenant compte de l’immunogénicité des vaccins et de la durée de l’immunité qu’ils confèrent.

Par exemple, le vaccin contre le tétanos est administré de manière espacée avec des rappels tous les dix ans, car l’immunité diminue lentement avec le temps.

En revanche, les vaccins contre les maladies infantiles courantes, comme la diphtérie, la coqueluche et le tétanos, sont administrés sous forme de combinaisons pour simplifier le calendrier et garantir une protection continue.

En somme, le calendrier vaccinal est élaboré en tenant compte de la réaction immunitaire, de l’immunogénicité des vaccins et de la nécessité de rappels pour maintenir une immunité protectrice. Il vise à offrir une protection efficace et continue contre un large éventail de maladies infectieuses, contribuant ainsi à la santé publique en prévenant la propagation de ces maladies.

Les différents types de vaccins

  • Vaccins vivants atténués : ces vaccins contiennent des versions affaiblies mais vivantes du micro-organisme ciblé. Un exemple : le vaccin contre la rougeole, les oreillons et la rubéole (ROR) comme le Priorix©. Ces vaccins utilisent une forme atténuée des virus pour déclencher une réponse immunitaire sans causer la maladie.
  • Vaccins inactivés : ces vaccins sont fabriqués à partir de micro-organismes tués ou inactivés. Le vaccin combiné contre la coqueluche, la diphtérie, la poliomyélite et le tétanos est un exemple, à l’image du Repevax©. Ils ne peuvent en aucun cas entraîner la maladie, mais incitent le système immunitaire à réagir.
  • Vaccins protéiques : ces vaccins utilisent des protéines spécifiques du micro-organisme pour stimuler une réponse immunitaire. Le vaccin contre la méningite B, tel que le vaccin Bexsero©, est un exemple. Ce vaccin utilise des protéines spécifiques présentes à la surface de la bactérie Neisseria meningitidis B pour stimuler une réponse immunitaire protectrice contre cette souche de méningocoque.
  • Vaccins à ARNm : les vaccins à ARN messager, comme le vaccin Pfizer-BioNTech contre la Covid-19, fournissent des instructions génétiques pour produire une protéine du micro-organisme. Le système immunitaire réagit à cette protéine, créant une immunité.
  • Vaccins à VLP (Virus-Like Particles) : le Gardasil©, par exemple, est un vaccin à VLP pour prévenir les infections par le papillomavirus humain (HPV). Il utilise des pseudo-particules virales (VLP) hautement purifiées dérivées de la principale protéine L1 de la capside des HPV des types 6, 11, 16 et 18. Ces VLP sont conçues pour imiter la structure des virus HPV, mais elles ne contiennent pas de matériel génétique viral, ce qui les rend non infectieuses.

Comment aborder la vaccination au comptoir ?

Dans l’optique d’aborder la vaccination au comptoir de manière efficace, plusieurs approches peuvent être mises en œuvre. Tout d’abord, le carnet de santé ou le carnet de vaccination se révèle être un excellent point de départ pour entamer une discussion sur la vaccination.

Lorsqu’un patient vient chercher un médicament ou un autre produit, il est opportun de lui demander si sa vaccination est à jour.

Par exemple, vous pouvez dire : « J’ai remarqué que vous avez des enfants. Sont-ils à jour avec leurs vaccins, comme celui contre le papillomavirus ? Puis-je jeter un coup d’œil à leur carnet de santé pour vous aider à vérifier ? »

De plus, adopter une approche proactive lors de situations spécifiques peut s’avérer efficace. Lorsque les patients viennent chercher des produits spécifiques tels que des pansements ou des désinfectants, cela offre une opportunité pour aborder la prévention par le biais de la vaccination.

Par exemple, en cas de coupure, vous pouvez dire : « Certaines coupures peuvent parfois entraîner des infections, comme le tétanos. Savez-vous si votre vaccin antitétanique est toujours valide ? »

  • Les personnes atteintes de certaines pathologies chroniques (comme le diabète ou l’asthme) ou celles qui passent par des étapes de la vie (comme la grossesse) peuvent avoir des recommandations vaccinales spéciales. Par exemple, avec une personne diabétique, vous pouvez aborder la question en ces termes : « Votre diabète peut rendre votre système immunitaire plus vulnérable. Avez-vous envisagé d’effectuer un rappel vaccinal contre la Covid-19 ? »
  • Il est également possible d’utiliser les saisons comme levier pour rappeler l’importance de certains vaccins. Par exemple, en automne, vous pouvez dire : « Avec l’arrivée de l’automne et de la saison de la grippe, avez-vous pensé à vous faire vacciner pour vous protéger, vous et vos proches ? »
  • Lorsqu’un patient demande des conseils ou des produits pour un voyage, cela constitue une belle opportunité pour discuter de la vaccination du voyageur. Par exemple : « Votre voyage en Asie du Sud-Est est une belle aventure à venir. Avez-vous vérifié si vous avez besoin de vaccins spécifiques, comme celui contre la fièvre jaune ou l’hépatite A ? »
  • Parfois, des épidémies ou des cas médiatisés peuvent servir de prétexte à la discussion sur la vaccination. Par exemple, en cas d’épidémie de rougeole dans la région, vous pouvez dire : « Avec la récente épidémie de rougeole dans notre région, c’est un bon moment pour vérifier si toute la famille est protégée. Puis-je vous aider à vérifier cela dans votre carnet de santé ? »

Enfin, lorsque les parents viennent chercher des médicaments pour enfants, ils sont souvent réceptifs à discuter de la prévention chez les plus petits. Par exemple : « Les enfants sont particulièrement exposés à certaines maladies évitables par la vaccination, comme la bronchiolite ou la méningite. Est-ce que vos enfants ont reçu ces vaccins ? »

Chaque interaction au comptoir offre une opportunité de parler de la vaccination.

Il est essentiel d’adopter une approche bienveillante, informative et non jugeante pour établir un dialogue constructif et gagner la confiance des patients en abordant ces sujets sensibles.

Face à un patient réticent : que faire ?

Engager une conversation sur la vaccination avec un individu sceptique ou réticent demande une approche empreinte d’empathie, de respect et d’informations solides. Voici quelques lignes directrices pour guider une telle discussion :

  • Tout d’abord, mettez en avant l’écoute et l’empathie. Commencez par prêter une oreille attentive aux préoccupations du patient, sans interruption ni jugement. Comprendre les craintes et les doutes spécifiques permet d’adapter vos réponses de manière pertinente. Par exemple, vous pourriez dire : « Je comprends que vous ayez des inquiétudes concernant les vaccins. Beaucoup de personnes partagent ces mêmes appréhensions. Pourriez-vous me dire plus précisément ce qui vous préoccupe ? »
  • Ensuite, abordez les craintes en fournissant des informations basées sur des données scientifiques, tout en les rendant accessibles. Par exemple, si le patient craint les effets secondaires ou pense que le vaccin pourrait transmettre la maladie, vous pouvez expliquer : « Il est largement documenté que les vaccins ne transmettent pas les maladies contre lesquelles ils protègent. Ils contiennent généralement une version affaiblie ou inactive du virus, à l’image d’une carte d’identité, qui aide votre système immunitaire à se préparer à combattre l’infection. »

Pour démystifier les « théories du complot », contextualisez l’usage des vaccins dans une perspective de santé publique. Par exemple, si le patient évoque l’enrichissement des laboratoires, vous pouvez préciser : « Les vaccins sont élaborés dans le but premier de prévenir des maladies parfois graves. La vaccination à grande échelle a permis l’éradication ou le contrôle de nombreuses maladies, et cette démarche vise avant tout à protéger la population plutôt qu’à générer du profit. »

L’utilisation d’exemples concrets peut être un moyen efficace pour convaincre. Partagez des histoires de réussite de la vaccination et expliquez les conséquences des maladies évitables par celle-ci. Par exemple : « L’introduction du vaccin contre la variole a conduit à l’éradication complète de cette maladie mortelle au niveau mondial. Ainsi, les vaccinations successives ont permis de sauver des millions de vies à travers l’histoire. »

Établissez la confiance en rassurant le patient sur votre rôle et vos intentions en tant que professionnel de santé. Par exemple : « Mon rôle en tant que pharmacien est de veiller à votre santé et à votre bien-être. Les informations que je partage avec vous proviennent de données scientifiques validées, et mon objectif est de vous aider à prendre des décisions éclairées pour protéger votre santé. »

Proposez des ressources fiables au patient pour qu’il puisse approfondir ses recherches. Par exemple : « Je vous encourage à explorer le site de l’Organisation Mondiale de la Santé ou de l’Assurance maladie pour plus d’informations fiables sur les vaccins. »

Enfin, respectez la décision finale du patient, même si elle va à l’encontre de vos conseils. Par exemple : « Quelle que soit votre décision, je la respecte. Je suis ici pour discuter, répondre à vos questions et vous soutenir dans vos choix de santé. »

Cultiver la patience, la bienveillance et l’utilisation de données factuelles est essentiel pour naviguer à travers les discussions sur la vaccination, en particulier avec les individus réticents.