TROD cystite : faut-il mettre à disposition ses toilettes ?

L'arrivée des tests rapides d’orientation diagnostique (TROD) pour la cystite, effective depuis juin 2024, a marqué un tournant dans la prise en charge en officine. Ce test permet aux pharmaciennes et pharmaciens de détecter les infections urinaires simples et, si besoin, de délivrer un antibiotique sans ordonnance. Toutefois, un point logistique reste incertain : la présence de toilettes en officine est-elle indispensable pour valider la prise en charge de l’acte par l’Assurance maladie ?

Par Thomas Kassab, publié le 31 octobre 2024

TROD cystite : faut-il mettre à disposition ses toilettes ?

La CNAM et l’exigence des toilettes : une interprétation restrictive

L’Assurance Maladie a précisé que la réalisation du test en officine, dans un espace approprié incluant des toilettes, est indispensable pour garantir la prise en charge financière. Cette interprétation vise à permettre le recueil immédiat d’un échantillon d’urine dans des conditions d’hygiène contrôlées. Cependant, ce point fait débat, car les textes publiés ne précisent pas explicitement cette obligation. En effet, selon l’USPO, représentée par Pierre-Olivier Variot, les textes officiels n’exigent pas la disponibilité de toilettes sur place, permettant en théorie la collecte de l’échantillon à domicile​

Enjeux et défis pour les pharmaciens

Pour de nombreux pharmaciens, l’exigence de toilettes pose un réel défi. Les officines urbaines, souvent contraintes par la surface disponible, ne disposent pas toujours d’infrastructures pour accueillir des toilettes accessibles aux patients. Ce point pourrait limiter l’accès au service TROD cystite dans certaines officines, restreignant l’atteinte de l’objectif de cette nouvelle mission : favoriser un accès rapide aux soins.

Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), a mis en avant la nécessité de clarifier la réglementation afin de permettre des prélèvements réalisés à domicile, comme c’est le cas pour certains tests en laboratoire. Cette souplesse, selon lui, faciliterait la généralisation du TROD cystite et assurerait une couverture plus large du territoire​.

L’impasse des délais de rétention urinaire

La situation se complexifie avec la notion de rétention d’urine, évoquée dans les formations TROD cystite, qui impose un délai de quatre heures avant le prélèvement. Cela soulève des interrogations pratiques pour les officines : est-il envisageable que les patientes attendent sur place ou doivent-elles respecter ce délai chez elles avant de venir en pharmacie ? À ce jour, aucune réponse précise n’a été fournie par l’Assurance Maladie, accentuant l’incertitude pour les pharmaciens et les patients​.

Une évolution attendue des textes

Les deux syndicats, FSPF et USPO, ont rappelé à la CNAM l’importance de revoir sa position pour répondre aux réalités de terrain et faciliter le déploiement du TROD cystite. Selon Philippe Besset, cette exigence de toilettes est « intenable » et pourrait nuire à l’efficacité de ce nouveau service. La CNAM a promis de solliciter à nouveau la direction générale de la santé (DGS) pour clarifier cette exigence et ajuster les modalités réglementaires si nécessaire. La profession espère que ces ajustements permettront une prise en charge plus flexible et accessible à tous les patients​.

L’argument de l’extemporanéité pour garantir fiabilité et sécurité

Quoi qu’il en soit, un TROD est conçu pour être réalisé de manière extemporanée, garantissant la qualité et la fiabilité des résultats. Un prélèvement d’urine fait à l’extérieur de l’officine, en l’absence de conditions strictes de conservation, risque de compromettre la fiabilité du test. Ce mode de fonctionnement permet aussi de s’assurer de l’identité de la patiente au moment du prélèvement, renforçant la sécurité de la procédure.