Pourquoi les compléments à base de Garcinia cambogia sont-ils désormais interdits ?

Considérée à tort comme une alliée minceur naturelle, la plante Garcinia cambogia est désormais bannie des rayons français. En cause : l’identification d’effets indésirables graves, sans seuil de sécurité identifié. Décryptage d’une décision d’interdiction fondée sur des données scientifiques préoccupantes.

Par Thomas Kassab, publié le 21 avril 2025

Pourquoi les compléments à base de Garcinia cambogia sont-ils désormais interdits ?

Une interdiction nationale à effet immédiat

Par un arrêté conjoint du ministère de l’Agriculture et de celui de l’Économie, publié le 15 avril 2025, la France interdit toute commercialisation, introduction ou importation de compléments alimentaires contenant Garcinia cambogia. Cette décision, prise dans le cadre d’une procédure de sauvegarde nationale, vise à protéger les consommateurs face à un risque sanitaire avéré, en attendant une éventuelle harmonisation européenne.

Un signal scientifique fort : l’avis de l’Anses

À l’origine de cette interdiction, l’avis rendu par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) le 5 mars 2025. Après analyse de plusieurs signalements d’effets indésirables, l’Anses recommande de ne plus consommer de compléments contenant Garcinia cambogia, en raison de risques hépatiques, gastro-intestinaux et neuropsychiatriques graves, rapportés chez des individus avec ou sans antécédents médicaux.

L’agence souligne un point crucial :

Aucun seuil d’exposition toxique n’a pu être établi, même à des doses considérées comme modérées.

Le rôle central de l’acide hydroxycitrique (AHC)

Le Garcinia cambogia contient un actif végétal phare : l’acide hydroxycitrique (AHC). Utilisé pour ses propriétés supposées de réduction de l’appétit, blocage de la lipogenèse hépatique et modulation du métabolisme glucidique, l’AHC est pourtant à l’origine des troubles observés.

Sur le plan mécanistique, l’AHC agit comme inhibiteur de l’ATP citrate lyase, une enzyme clé dans la conversion des glucides en acides gras. Cette action, bien que séduisante en théorie, pourrait interférer avec les fonctions métaboliques hépatiques et neuronales, notamment en cas de polymédication ou de terrain fragile, selon l’Anses.

Les études de toxicité disponibles restent parcellaires et hétérogènes, rendant impossible toute extrapolation sécuritaire en population générale.

Produits concernés : des références connues en officine

Plusieurs compléments alimentaires contenant du Garcinia cambogia étaient présents dans les pharmacies françaises, comme :

  • Arkogélules Garcinia Cambogia (Arkopharma) : 802 mg d’AHC par jour, vendu pour soutenir la gestion du poids.

  • Garcinia Cambogia (Laboratoire Beauchamp) : proposé comme brûleur de graisses et coupe-faim.

Ces références sont désormais formellement interdites, y compris en cas de stocks résiduels.

Retrait-rappel : une obligation réglementaire

L’article 2 de l’arrêté impose aux exploitants du secteur alimentaire :

  • De procéder au retrait-rappel immédiat des produits contenant la plante, y compris ceux déjà déclarés à la DGCCRF ;

  • De collaborer aux inspections des autorités de contrôle, qui vérifieront le respect des obligations réglementaires (conformément au décret n°2006-352).

Le pharmacien en première ligne

Dans ce contexte, le rôle du pharmacien d’officine est central :

  • Audit immédiat des stocks de compléments nutritionnels minceur ;

  • Retrait des références concernées et affichage d’une note de rappel si nécessaire ;

  • Information claire des patients, notamment ceux ayant acheté ou consommé ces produits, avec orientation vers le médecin en cas de symptômes.

Il est également crucial de redoubler de vigilance sur les produits en ligne, souvent achetés sans conseil, et susceptibles de contenir l’ingrédient interdit.

À retenir pour le conseil officinal

Le Garcinia cambogia n’est pas simplement « déconseillé » : il est désormais interdit par arrêté, en raison d’un risque sanitaire avéré et non quantifiable. Le pharmacien doit retirer tout produit concerné, en informer ses équipes et rappeler les patients si besoin. Cette interdiction souligne l’importance d’une veille scientifique rigoureuse sur les actifs végétaux à visée minceur.