TFR et baisses de prix : une attaque frontale contre les pharmacies ?
Après avoir annoncé des réductions de prix sur plusieurs dispositifs médicaux, le Comité économique des produits de santé (CEPS) dévoile une nouvelle vague de baisses de prix et de mises sous TFR pour les médicaments génériques. Cette initiative, destinée à réaliser 65 millions d’euros d’économies pour l’assurance-maladie, est vivement critiquée par les syndicats pharmaceutiques, qui dénoncent une politique tarifaire « aberrante » menaçant l’accès aux médicaments et la viabilité des officines.
Après l’annonce de réductions de prix sur des produits comme les pansements hydrocellulaires, les dispositifs d’autosurveillance de la glycémie et les orthèses, pour un total de 35 millions d’euros, le Comité économique des produits de santé (CEPS) a présenté aux syndicats pharmaceutiques une proposition de 14 pages visant de nouvelles baisses de prix et des mises sous tarifs forfaitaires de responsabilité (TFR) pour les médicaments génériques. Ces propositions suscitent de vives réactions dans le secteur.
Un exemple particulièrement préoccupant concerne la Ritaline : « Nous avons signalé des ruptures sur les autres médicaments à base de méthylphénidate. Imposer un TFR à la Ritaline dans ces conditions serait contre-productif », ajoute Pierre-Olivier Variot. La réforme concernant les fauteuils roulants, que le ministère de la Santé souhaitait voir adopter avant un changement de gouvernement, prévoyant des baisses de tarif pour la location hebdomadaire des fauteuils mécaniques à 3 euros, sera finalement examinée par le prochain gouvernement, offrant ainsi un répit aux pharmaciens.
Lors de la réunion du comité de suivi des génériques tenue le 4 juillet, le CEPS a proposé une nouvelle vague de baisses de prix et de mises sous TFR, touchant principalement des médicaments à marge thérapeutique étroite, tels que les anti-épileptiques (lévétiracétam, locosamide), des médicaments exclus du dispositif « tiers payant contre générique » (comme la buprénorphine), et certains anticancéreux. En tout, « 14 pages de médicaments » sont concernées, selon Pierre-Olivier Variot, président de l’Union des syndicats pharmaceutiques de France (USPO). Certaines propositions sont jugées « aberrantes » par Denis Millet, secrétaire général de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF).
Le CEPS a également proposé des réductions de prix sur du matériel médical, visant à économiser 10,65 millions d’euros sur les pansements hydrocellulaires, 9,18 millions d’euros sur le matériel d’autosurveillance de la glycémie et 15,9 millions d’euros sur les bas et orthèses de compression, pour un total de plus de 35 millions d’euros. Pour Pierre-Olivier Variot, « cela signifie que nous débutons ce nouvel avenant à la convention pharmaceutique avec une baisse des prévisions », ce qui introduit des biais dans les projections.
Globalement, ces mesures devraient permettre une économie de 65 millions d’euros pour l’assurance-maladie, mais les remises comptables entraîneraient une perte de 15 millions d’euros pour les officines, selon les calculs de Denis Millet. Les syndicats critiquent une politique tarifaire jugée trop restrictive et en contradiction avec les objectifs de santé publique. « Cette approche ne peut que nuire à l’accès aux médicaments, à la stabilité des officines, et à la substitution générique », affirme la FSPF, qui recommande plutôt de cibler les économies sur les produits très coûteux.
Denis Millet met en lumière des exemples problématiques, notamment pour des médicaments comme le sévélamer et la métopimazine, souvent difficiles à obtenir en officine et donc avec un taux de substitution faible. « Prenons l’exemple de l’urapidil : il n’y avait qu’un seul générique disponible et difficile à obtenir, ce qui entraînait un faible taux de substitution. De nouveaux génériques ont été introduits en septembre, mais le CEPS veut imposer un TFR immédiatement, sans permettre le temps nécessaire pour leur adoption. La même situation se présente avec les ampoules de cholécalciférol », précise-t-il.
En outre, la réduction sur la remise « génériques » pour 2023, initialement estimée à 11 millions d’euros par l’assurance-maladie, serait en réalité de 31 millions d’euros, selon Pierre-Olivier Variot.
Ces mesures soulèvent de nombreuses questions sur l’avenir de la profession et la disponibilité des médicaments. Le secteur attend avec impatience les décisions du prochain gouvernement sur ces sujets critiques.