Une perte de 18 millions d’euros : les complémentaires santé fragilisent les officines
La santé économique des pharmacies d’officine vacille. Dernier coup porté : la signature de nouvelles conventions entre certains représentants de l’Assurance Maladie Complémentaire (AMC) et la Fédération des Syndicats Pharmaceutiques de France (FSPF), qui pourrait priver le réseau de 18 millions d’euros par an. C’est en tout cas ce que dénonce l’Union des Syndicats de Pharmaciens d’Officine (USPO), dans un communiqué publié le 11 décembre 2024, tirant la sonnette d’alarme sur une situation qu’elle qualifie de "régression historique".
Une indemnité historique supprimée
Jusqu’ici, les pharmacies percevaient une indemnité forfaitaire de 0,03 € par facture transmise aux AMC via des opérateurs comme Viamedis ou Isanté. Ce mécanisme, bien que modeste, représentait un soutien financier collectif significatif pour les officines, permettant de compenser une partie des frais liés à la gestion du tiers payant.
Or, les nouvelles conventions signées par la FSPF sans concertation avec les officinaux mettent fin à cette indemnité forfaitaire. En échange, une nouvelle compensation de 1 € par facture rejetée dans le cadre de Visiodroit a été proposée. Problème : avec un taux de rejet de seulement 0,05 %, cette mesure s’apparente à une suppression déguisée, réduisant les revenus des pharmacies de manière drastique.
Des choix contestés par la profession
L’USPO ne mâche pas ses mots : les décisions prises par la FSPF, sans consultation de la profession, fragilisent un réseau déjà sous tension. Avec un tiers payant qui s’avère de plus en plus complexe et chronophage, ces modifications sont perçues comme un abandon des intérêts des officinaux, alors même que ces derniers assument des efforts considérables pour faciliter l’accès aux soins.
Les conséquences vont bien au-delà des 18 millions d’euros. Ces pertes financières, cumulées à l’alourdissement des tâches administratives, risquent de dissuader de nombreuses officines d’accepter le tiers payant, un service pourtant plébiscité par les patients. L’USPO rappelle d’ailleurs que le tiers payant, loin d’être une obligation, relève d’un choix des pharmaciens, témoignant de leur engagement envers la population.
Une indépendance revendiquée
Face à ces décisions, l’USPO revendique sa crédibilité et son indépendance. Contrairement à la FSPF, elle souligne ne pas être liée à des filiales informatiques ou à des intérêts financiers externes. Ce positionnement lui permet, selon ses représentants, de défendre uniquement l’intérêt des pharmacies et d’appeler à une meilleure concertation entre les syndicats pour préserver la pérennité du réseau.
Une profession à un tournant
Au-delà de ce différend syndical, cette affaire illustre un défi structurel plus large : la survie économique des pharmacies dans un environnement où la pression financière et administrative ne cesse de croître. Si des mesures de soutien claires ne sont pas adoptées rapidement, c’est tout le modèle de l’officine, pilier de l’accès aux soins, qui risque de vaciller.
Dans ce contexte, la question se pose : qui doit protéger les pharmacies ? Les syndicats sont-ils encore les interlocuteurs fiables pour défendre un réseau mis à mal ? Une chose est certaine : la santé économique des officinaux ne saurait être laissée à l’arrière-plan des discussions. Les décisions prises aujourd’hui auront des conséquences durables sur l’accès aux soins de demain.