Rinvoq® : un tournant dans le traitement des MICI

Dans un entretien exclusif, le Professeur Laurent Peyrin-Biroulet, spécialiste des maladies inflammatoires chroniques de l'intestin du CHRU de Nancy, explore les bénéfices du Rinvoq® (upadacitinib). Ce traitement innovant pour la maladie de Crohn et la rectocolite hémorragique introduit un mécanisme d'action novateur.

Par Thomas Kassab, publié le 23 avril 2024

Rinvoq® : un tournant dans le traitement des MICI

Rinvoq® est un traitement médicamenteux récemment introduit dans l’arsenal thérapeutique pour combattre les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI), incluant la maladie de Crohn et la rectocolite hémorragique (RCH). Ces maladies sont caractérisées par une inflammation prolongée du tractus gastro-intestinal, entraînant une variété de symptômes douloureux et souvent invalidants qui peuvent sévèrement affecter la qualité de vie des patients.

Les inhibiteurs de la Janus kinase (JAK), tels que Rinvoq®, représentent une avancée majeure dans le traitement des MICI grâce à leur capacité à cibler et inhiber les enzymes JAK qui jouent un rôle crucial dans la signalisation de cytokines pro-inflammatoires. En interrompant ces signaux, Rinvoq aide à réduire l’inflammation et à améliorer les symptômes associés à ces conditions difficiles à gérer.

Cette nouvelle classe de médicaments offre une stratégie de traitement plus complète, agissant sur plusieurs voies inflammatoires simultanément, ce qui peut augmenter les chances de rémission et améliorer la gestion globale de la maladie. Rinvoq® se distingue par son approche innovante qui pourrait transformer le paysage thérapeutique pour les patients souffrant de MICI.

Dans l’interview qui suit, nous explorerons avec le Professeur Peyrin-Biroulet les implications de l’intégration des inhibiteurs JAK dans les protocoles de traitement des MICI, l’efficacité des traitements actuels, et l’impact spécifique de Rinvoq dans ce domaine. Nous discuterons également des défis liés à la tolérance du médicament et des conseils essentiels pour sa délivrance en officine, ainsi que des perspectives futures pour cette thérapie prometteuse.

En quoi l’intégration des inhibiteurs JAK dans le traitement des MICI constitue-t-elle une avancée significative ?

Les inhibiteurs de la Janus kinase (JAK) sont une classe de médicaments novatrice dans le traitement des MICI. Ces médicaments ciblent les enzymes JAK, importantes pour la signalisation de cytokines qui contribuent à l’inflammation. En inhibant ces enzymes, les inhibiteurs JAK diminuent l’inflammation et améliorent les symptômes des MICI. Cette approche est particulièrement bénéfique car elle agit sur plusieurs voies de signalisation à la fois, offrant ainsi une stratégie de traitement plus complète pour ces maladies complexes.

Quelle est l’efficacité des traitements actuels ?

Professeur Peyrin-Biroulet : Les traitements actuels atteignent un plateau en termes d’efficacité, avec des taux de rémission complète plafonnant autour de 20%. La pathogénie de ces maladies est extrêmement complexe, impliquant de nombreux facteurs immunitaires et environnementaux. Cela rend difficile la conception de traitements qui agissent de manière globale plutôt que ciblée. Les traitements traditionnels sont souvent limités à des cibles spécifiques, ce qui ne permet pas d’atteindre des taux de rémission plus élevés.

Qu’apporte l’arrivée du Rinvoq dans l’arsenal thérapeutique ?

Professeur Peyrin-Biroulet : Rinvoq représente une avancée significative grâce à son mécanisme d’action unique en tant qu’inhibiteur de JAK, qui intervient dans plusieurs voies inflammatoires. Cette polyvalence permet d’espérer une amélioration des taux de rémission grâce à une modulation plus complète des réponses immunitaires. En outre, cela permet une rotation thérapeutique plus flexible, crucial pour gérer la résistance ou les réponses diminuées à certains traitements.

Quels sont les aspects à surveiller concernant la tolérance de ce médicament ?

Professeur Peyrin-Biroulet : Bien que Rinvoq offre de nouveaux espoirs, il nécessite une surveillance attentive, particulièrement chez les patients avec des antécédents cardiovasculaires, des risques oncologiques, ou des personnes âgées. Il est essentiel de surveiller les effets secondaires, tels que les infections opportunistes, et de gérer activement les risques en ajustant les dosages et en suivant les recommandations cliniques.

Quels conseils doit-on prodiguer spécifiquement lors de la délivrance du Rinvoq® en officine ?

Professeur Peyrin-Biroulet : Il est essentiel d’informer les patients sur l’importance de l’adhésion au traitement quotidien et de la surveillance régulière via des analyses de sang pour détecter tout signe d’effet secondaire précoce. Les pharmaciens doivent souligner l’importance de la constance dans la prise du médicament et de la communication ouverte avec leur équipe soignante pour tout symptôme inhabituel, comme le zona ou l’acné, qui peut survenir à n’importe quel moment.

Quels sont les éléments les plus importants à retenir de la nouvelle indication du Rinvoq ?

Professeur Peyrin-Biroulet : Le point clé est l’introduction d’un mécanisme d’action novateur dans le traitement de la maladie de Crohn, une première pour les inhibiteurs JAK dans cette maladie. Cela représente une étape significative en avant, augmentant la probabilité de trouver le bon traitement pour le bon patient. Pour la rectocolite hémorragique, Rinvoq rejoint d’autres inhibiteurs JAK (filgotinib, tofacitinib ndlr), enrichissant les options thérapeutiques disponibles et offrant des comparaisons prometteuses en termes d’efficacité dans les études et analyses.